Les années 70, une décade très riche pour Jethro Tull avec pas moins de dix albums originaux produits dans la période, en démarrant par ‘Benefit’ en 1970 et se terminant par ‘Stormwatch’ en 1979. Une production annuelle courante à l’époque, bien loin de celles que nous connaissons actuellement, tout ça pour dire que ce groupe mené de main de maître par son leader et compositeur Ian Anderson possédait un talent de compositeur remarquable. Après avoir pondu les chefs-d’œuvre que sont : Aqualung (1971), Thick as a Brick (1972) et mon préféré A Passion Play (1973), la question se posait, lui restait-il assez de ressources pour s’attaquer de nouveau à un concept album ?
L’opus en question sorti en 1976 porte le titre, ‘Too Old To Rock’n’roll : Too Young To Die !’ et s’articule sur un concept qui tourne autour de la vie de Ray Lomas (illustrée dans la b.d. du livret), un vieux rockeur ‘trop jeune pour mourir’. En fait l’ensemble des compositions sont une réponse aux mauvaises critiques reçues par la formation depuis la sortie de ‘A Passion Play’. Un album ambitieux et surprenant, mais décrié par pas mal de monde car s’écartant du schéma rock/prog classique présent dans les précédentes productions du groupe, Une affaire de goût me direz-vous. Pour ma part ‘A Passion Play’ reste un des albums des plus emblématiques du Tull.
Pour répondre à la question que je me posais, en 1976, lors de l’achat du vinyle ‘Too Old To Rock’n’roll : Too Young To Die !’, Ian Anderson en a-t-il encore sous le coude et nous concoctera-t’il un album de premier ordre ? Eh bien, oui et non, dès la première écoute mon ressenti fût mitigé, certaines pièces tirent honorablement leur épingle du jeu mais d’autres sombrent dans un océan de déjà entendu.
Au titre des compositions qui sortent la tête de l’eau, je vous recommande, la première plage « Quizz Kid » qui s’ouvre en douceur sur un thème repris plus tard dans le titre éponyme, du Tull pur jus, breaks puissants et mélodies enjôleuses s’acoquinent dans un maelstrom où les genres (Prog/rock/folk) privilégiés par le groupe se font la part belle. « Crazed Institution », qui suit, est pas mal non plus, exhibant un fort penchant folk accentué par les interventions de Ian à la flûte. L’intimiste « Salamander » dominé par les guitares acoustiques est d’une simplicité mélodieuse attachante. Le chant chaleureux et profond d’Anderson sur « From A Deadbeat To An Old Greaser » lui apporte un caractère atmosphérique ténébreux. Retour dans les grands classiques de Jethro Tull avec la semi-ballade « Too Old To Rock’n’roll : Too Young To Die ! » qui réunit à elle seule tous les ingrédients de la mélodie à fredonner et que je place dans le top 5 des titres indispensables à connaitre du Tull*. « Pied Piper » est une composition minimaliste, l’accent est mis sur la voix de Ian, véhiculant avec elle un sentiment de bien-être.
Puis il y a ceux qui ne passent pas, non pas qu’ils soient mauvais, mais qui sentent la redite et le manque d’inspiration, « Taxi Crab » un folk/prog banal, « Big Dipper » à la recette maintes fois entendue, « Bad-Eyed And Loveless » typé blues, et le dernier titre de l’album, le sirupeux « The Chequered Flag (Dead Or Alive) ». Il faut dire que le Tull nous avait habitué à un niveau de composition plus constant dans ses précédentes productions !
Pour conclure, « Too Old To Rock’n’roll : Too Young To Die ! » est et restera un album de transition qui nous a permis de patienter entre deux excellents albums ‘Minstrel in the Gallery’ (1975) et ‘Songs from the Wood’ (1977). Une bonne nouvelle, le groupe dont la dernière production discographique remonte à 2003 (The Jethro Tull Christmas Album) a déjà terminé un nouvel album, intitulé ‘The Zealot Gene’, qui sera disponible début 2022.
*Allez, je vous donne les quatre autres : ‘Aqualung’ (Aqualung 1971) – ‘Requiem’ (Minstrel in the Gallery 1975) – Jack-in-the-Green (Songs from the Wood 1977) – Moths (Heavy Horse 1977). En bonus, le titre qui enchanta mes oreilles d’adolescent et le plus connu du Tull : ‘Locomotive Breath’ de l’album, Aqualung en 1971, la version présente sur l’album (pas sur le 45 tours) est pourvue d’une longue introduction au piano et guitare qui vaut vraiment le détour.
Formation du groupe
Ian Anderson : chant, flûte, harmonica, guitare acoustique, guitare électrique, percussions - Martin Barre : guitare électrique - John Evan : piano, claviers - John Glascock : basse, chœurs - Barriemore Barlow : batterie, percussions - Avec : David Palmer : saxophone (5), piano (11), orchestration - Angela Allen : chœurs (2, 7) - Maddy Prior : chœurs (8)