The Path

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(5 sur 5) / Autoproduction
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Rock Progressif

Une liste impressionnante d’instruments de toutes sortes et de toutes origines, un chœur, un nombre conséquent d’interprètes : 112 instruments et 24 musiciens. A la découverte du groupe toulousain Light, voilà déjà un premier motif d’étonnement avec des chiffres qui relèvent plus de la musique symphonique classique pour grand orchestre que du rock progressif habituel. Cela situe d’emblée les ambitions de Camille de Carvalho et de son groupe !

Vous l’avez compris, The Path est justement tout sauf un album « habituel » : une suite musicale riche de 15 morceaux qui s’enchainent dans un style global de musique « classique » contemporaine, voire avant-gardiste, et qui se teinte à l’occasion d’accents rock ou jazz. Une musique sophistiquée, c’est indéniable, qui nécessite de la part de l’auditeur de se porter à la hauteur de vue des musiciens, mais qui reste toujours parfaitement intelligible. Ne vous laissez pas tromper par la pochette de l’album : avec cette route droite (éventuellement goudronnée) qui vous mène directement vers ces hautes montagnes, certes éloignées, mais bien en ligne de mire. De « Seekness » à « Lux Æterna », le chemin qu’on nous propose ici n’est pas aussi linéaire et son but ultime n’est pas si évident. Cela relève plutôt du chemin initiatique !

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Cinq des morceaux présentés sont très courts : « Cornua », « Tibia », « Electris », « Tympana », « Chalemia », en guise de ponctuation dans le très dense discours musical, et sont en quelque sorte des études de sonorités pour quelques instruments particuliers. A propos de ces derniers, l’emploi d’Ondes Martenot, pour n’en citer qu’un, un des ancêtres des instruments électroniques, m’a particulièrement interpellé : j’avais découvert cet étonnant instrument à l’écoute de nombreuses œuvres d’Olivier Messiaen. J’ai appris depuis que Radiohead en faisait aussi usage à l’occasion.

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Allez, mettons en route avec « Seekness », véritable carte de visite de l’album, et résumé de tout ce qui va suivre. On débute par un long développement planant, puis surgissent des riffs inquiétants survolés par une mélodie lente qui pourrait potentiellement provenir de l’Onde Martenot, justement – il n’est pas toujours facile d’identifier précisément les timbres dans un tel foisonnement sonore, et on peut facilement prendre des vessies pour…euh, un instrument pour un autre ! Un court break mélodique accompagné par de très beaux accords au piano nous emmène sur un mid-tempo en ostinato, parfaitement orchestré.

« The Sweet Release of Death » avec ses harmonies flottantes m’évoque quelques passages des Métaboles de Dutilleux, tandis que « Blue Sun » aborde un style plus jazz, pour autant qu’on puisse qualifier toute la richesse musicale par un simple mot-clé … « Betray », court mais extrêmement percutant, se révèle d’abord être un excellent jazz vocal accompagné aux cuivres, d’abord calme et posé avant de se déchainer dans un superbe staccato et de terminer sur un accord ample. Magnifique ! « Newts » s’épanouit sur le rythme donné par les accords de piano qui parcourent en ostinato l’ensemble du morceau. « The Sublimation Of An Oak » prend des accents folks, histoire de donner une indication sur le style de ce morceau qui va crescendo jusqu’au chœur final, en passant auparavant par une sorte de danse tribale. Le solo de batterie de « Tympana » nous amène sur les 14′ minutes de « Dive », un des sommets de l’œuvre, et qui joue à fond de toute la dynamique orchestrale et vocale, et de son ambitus. Un bel exemple de musique symphonique avant-gardiste.

Le tempo de marche lente de « Mesmerize » avec sa mélodie dans les graves semble vous clouer au sol, tandis que « Burning Birds », au contraire, cherche peu à peu à vous élever jusqu’au chœur céleste final qui enchaine sur la dernière étape, « Lux Æterna ».

Lux Æterna, à l’origine le chant de communion de la messe grégorienne des morts – le fameux Requiem, a été popularisé par d’immenses musiciens : Mozart, ou plus récemment Fauré et Duruflé, ou Elgar, pour en citer quelques-uns. Le « Lux Æterna » de Light, un très beau choral, tient plus de celui de Ligeti que de celui de Metallica (!), pour en citer 2 autres exemples. Les vocaux sont particulièrement saisissants et après quelques belles modulations tonales, la pièce se termine sur un mi majeur rayonnant. Ces voix venues de l’au-delà donnent le même frisson que le chœur féminin final de Neptune The Mystic de Holst.

Décrire la musique de The Path (*) en quelques phrases relève évidemment de la gageure, tant la densité et la qualité de l’écriture musicale, ainsi que le rendu sonore, sont d’une richesse inégalée et nous emmènent parfois loin de toute zone de confort. Il faut plusieurs écoutes pour s’approprier une œuvre souvent ambigüe dans son mélange de dissonances et de consonances, et qui ne se résout guère qu’à la toute fin. Une œuvre impressionniste moderne, que le maître à penser, Camille de Carvalho, avait un temps imaginé réaliser seul ou presque. 13 ans plus tard, c’est à vous de prendre la route et d’essayer de gagner la Lumière Eternelle !

(*) https://lightprogrock.bandcamp.com/releases

Formation du groupe

Camille De Carvalho - Jeanne De Carvalho - Auriann Rossard - Paul Ferré - Emmanuelle Marchaud - Camille Sabathier - Loup Vaillant - Caroline Kempf - Paul-Henry Touzac - Musiciens supplémentaires : Timothé Bougon : guitare acoustique, banjo, bouzouki, luth, chœur de barytons - Clément Gaudry-Santiago : acoustique 12 cordes; guitare, chœur de ténors Donnchadh Mullaghy : guitare électrique - Camille Montarou : timbales - Camille Fabreguettes : flûte - Anaïs Rabary : chœur de soprano - Lisa Chaïb Auriol : chœur de soprano - Marion Nicolas : chœur de soprano - Marie Le Pohon : chœur mezzo - Lisa Auneau : chœur alto - Audric Faucheux : chœur de ténors - Valentin Jansen : chœur de basse - Egon Zanne : chœur de basse - Hangsvart : growl

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