Cueille Le Jour

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(5 sur 5) / Musea
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Rock Progressif

En avril 1977, Carpe Diem publiait « Cueille Le Jour« .

Deux ans plus tôt, le public avait découvert ce groupe formé en 1970 et originaire de Nice, avec « En Regardant Passer Le Temps« . Ce répertoire essentiellement instrumental de quatre morceaux (dont trois entre neuf et douze minutes) proposait un rock progressif avant-gardiste aux ambiances cosmiques portées par les couches de synthétiseurs planants parfois proches du courant électronique allemand, et qu’accentuaient guitare électrique, flûte et saxophone aériens. A son côté spatial, s’ajoutait une fluidité rendant cette musique comparable à une formation comme Camel (période The Snow Goose & Moonmadness). Mais bien au-delà de ces références et analogies avec ses pairs britanniques, au sein de ce courant progressif symphonique auquel il était indéniablement affilié, le groupe a su offrir des paysages sonores originaux, somptueusement arrangés, et empruntant également au classique et au jazz. L’album suivant allait en faire, une fois encore, la plus belle des démonstrations.

Enregistré au studio d’Antibes en décembre 1976, « Cueille Le Jour » se divisait en deux parties avec une première face présentant cinq pièces courtes, et, sur la seconde, la bien nommée « Couleurs« , une suite épique de près de 22 minutes. « Naissance » était un court prélude où les nappes de synthés et saxophone soprano, accompagnées d’arpèges de guitare, et appuyées peu à peu par une imposante section rythmique pouvaient rappeler les climats des premiers King Crimson, Sur ‘Le Miracle De La Saint-Gaston« , Carpe Diem faisait une incursion inhabituelle dans ce traditionnel registre français (Ange, Mona Lisa, Atoll) où l’instrumentation se mettait au service d’un chant narratif porté par la voix douce et expressive de Christian Trucchi. « Laure » était un titre aux accents folk où peu à peu, derrière les notes de flûte & saxophone de Marius David, et le jeu à la fois délicat et complexe du guitariste Gilbert Abbenanti, pouvait également par moments, planer l’ombre de Jethro Tull. Sur « Tramontane« , l’instrumentation montait peu à peu dans une fusion musclée où la guitare électrique interagissait avec le saxophone. Cette première face se refermait avec un lent et classicisant « Divertimento » porté par Christian Trucchi sur des notes cristallines de piano dans un duo avec le saxophone soprano.

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Sur la seconde face, la longue pièce « Couleurs » divisée en cinq parties, s’ouvrait dans des notes calmes et vaporeuses d’orgue, synthé et arpèges de guitares, et où peu à peu la section rythmique s’installait et allait progressivement accélérer et installer les textures sonores d’un jazz auquel cuivre et vent donnaient parfois une touche canterburienne, prenant même, à environ douze minutes, une tournure mélodique quasiment impressionniste. Le chant uniquement présent sur « Rencontre » faisait place à une séquence entrainante à laquelle le saxophone et la flûte donnaient la couleur d’un folklore du monde que soulignait encore la guitare de Gilbert Abbenanti devenue ‘Oldfieldienne’, pour ensuite retrouver un final apaisé. Cette longue suite, indéniable pièce majeure de l’album, est à ranger définitivement parmi les grands moments du rock progressif français.

Malheureusement, si cet album emblématique d’une époque, compte parmi ces œuvres particulièrement appréciées des aficionados de rock progressif, ou simplement des amateurs d’une musique inspirée, originale et innovante, « Cueille Le Jour » fait partie des productions de cette fin des années 70, qui furent victimes du courant nihiliste punk émergeant, et qui allait endiguer et museler mais pour un temps seulement, cette vague créative, virtuose et souvent aventureuse qui avait fait la richesse d’une décennie exceptionnelle.

Depuis la réédition Musea de 1994, ‘Cueille Le Jour’ ne fut remasterisé (cd) qu’au Japon (Belle Antique) en 2007 avec deux titres bonus (‘Rencontre‘ en version anglaise et « Jardin De Verre » en live 1978). Par contre, comme ce fut le cas en 2019 pour l’album précédent, une réédition en vinyle remasterisé de « Cueille Le Jour » est également prévue très prochainement chez Lion Production.

Formation du groupe

Gilbert Abbenanti : guitares - Christian Truchi : claviers, piano, synthétiseur, chant - Alain Berge : basse - Alain Faraut : batterie - Claude Marius David : saxophone soprano, flûte, percussions

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