Le premier album du groupe Arti E Mestieri ‘’Tilt : Immagini Per Un Orecchio’’ paraissait en Avril 1974, année même où fut formé ce sextet majoritairement turinois autour du guitariste et compositeur principal Gigi Venegoni et du batteur Furio Chirico (ancien membre de The Trip). Ce qui faisait la richesse du groupe venait du fait que les musiciens émérites réunis ici, étaient issus de cultures musicales différentes, allant ainsi chacun apporter et enrichir ce répertoire, à l’instar de cet entonnoir qui illustrait la pochette de l’album. Cette musique majoritairement instrumentale à l’exception de deux morceaux puisait autant dans le rock que dans le jazz, intégrant en outre, quelques influences classiques. Ce combo occupant une place à part sur la scène italienne fut souvent comparé, côté prog, à PFM et côté jazz-rock au Mahavishnu Orchestra notamment à travers le jeu virtuose du violoniste Giovanni Vigilar.
Ce premier opus enregistré au studio Chantalain de Rome était coproduit par Gigi Venegoni et par Paolo Tofani, guitariste d’Area, un autre célèbre groupe transalpin de fusion progressive, toutefois moins accessible et plus expérimental qu’Arti E Mestieri, avec par ailleurs une forte connotation idéologique dans les textes, absente chez le groupe qui nous intéresse ici. La première plage ‘’Gravita 9,81’’ (l’une des pièces majeures de l’album) mariant dès les premières notes, mellotron et saxophone baryton annonçait déjà une musique toute en contrastes et changements perpétuels de paysages sonores, d’ambiances et de rythmes, portés par une instrumentation luxuriante, alternant un rock de chambre à des envolées instrumentales en passant par de séquences éthérées et placides. A l’exception du très court et dernier ‘’Tilt’ où une succession de sons électroniques ne devrait ravir que les amateurs d’une musique totalement abstraite (et dite contemporaine) chère à Karlheinz Stockhausen, l’ensemble de ce répertoire est un joyau mariant et arrangeant à merveille violon, cuivres à profusion, guitares, claviers de toutes sortes, mellotron, vibraphone sans oublier une belle section rythmique à l’instar du prodigieux et puissant batteur Furio Chirico n’ayant rien à envier à un Neil Peart et autre Dennis Chambers.
Rédiger une chronique détaillée de ce disque serait tâche titanesque, si l’on considère la pléthore de détails sonores, sa richesse à la fois harmonique mélodique à travers l’ingéniosité des combinaisons instrumentales mises en œuvre ici. J’épinglerai juste ‘’Articolazione’’, un morceau épique de 13 minutes, fédérant les amateurs de prog et de fusion, et sommet probable d’un album pour lequel plus d’une écoute est assurément nécessaire. Au cours de l’année qui suivit, ‘’Tilt : Immagini Per Un Orecchio’’ fut notamment élu ‘meilleur album de jazz-rock progressif’ italien par le magazine Rolling Stone (Il ne fut remasterisé pour l’Europe qu’en 2017 chez Cramps Records). Par la suite, toujours autour du binôme Chirico/Venegoni, le groupe sortit encore, au fil de quatre décennies, quelques autres albums remarquables, comme ‘’Giro Di Valzer Per Domani’’ l’année suivante, ‘’Murales’’ en 2000 encore ‘’Universi Paralleli’ en 2015. Un bon moyen de découvrir Arti E Mestieri peut simplement être ‘’Essentia, Live In Japan’’, un coffret 2 CD + DVD enregistré en 2019 et publié en 2020.
Formation du groupe
Furio Chirico : batterie, percussions - Beppe Crovella : pianos électrique & acoustique, synthétiseur ARP, mellotron, orgue Hammond - Marco Gallesi : basse - Gigi Venegoni : guitares, synthétiseur ARP - Giovanni Vigilar : violon, chant, percussion - Arturo Vitale : saxophones soprano & baryton, clarinette, clarinette basse, vibraphone
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