IV - Beaten Paths Different Ways

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(4.5 sur 5) / TRP Records
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Rock Progressif

Rome … Que sait-on de Rome ? Que tous les chemins y mènent (au moins 1000 d’après Alain de Lille au XIIe siècle), qu’on ne l’a pas bâtie en un jour (Miguel de Cervantès), qu’elle est la plus prodigieuse cité de l’univers (René Goscinny dans Astérix), et que les cloches de toutes les églises s’y rendent pendant la Semaine Sainte (d’après une belle histoire de ma grand-mère quand j’étais fort jeune). J’aime beaucoup y ajouter cette subtile description de Goethe : « A Rome il y a indépendamment des Romains, tout un peuple de statues. De même, en dehors du monde réel, il y a un monde imaginaire bien plus puissant que le premier, et au milieu duquel vivent la plupart des hommes ». Ce monde imaginaire, le natif de Cosence (Calabre), Vincenzo Ricca, le fait vivre à travers la somptueuse musique de The Rome Pro(g)ject, qui nous conte l’épopée romaine depuis l’album éponyme de 2012 (après JC). Le quatrième opus, tout juste sorti en décembre 2020, a cette particularité de revisiter les 3 premiers albums en nous offrant des pistes réarrangées, jouées différemment, avec des vocaux anglais ajoutés, et aussi 3 inédits sur le total de 13 pistes.

Je n’avais pas encore eu l’occasion d’aborder la musique du Rome Pro(g)ject, mais à l’écoute j’ai reçu cet album comme un opéra rock, à ceci près qu’on n’a pas affaire ici à de gentilles chansons pop formatées, mais à une musique progressive symphonique lyrique et romantique (le style italien !), bref puissamment évocatrice ! Je crois comprendre que 4eme opus est aussi, en ces temps troubles qui nous font passer beaucoup de temps à la maison, le résultat d’une réorientation du projet initial qui visait à des spectacles en tournées et à un album live. La partie n’est certainement que remise ! Quand je dis opéra (prog)rock, j’y inclus bien sûr l’abondance d’intervenants par ailleurs surqualifiés : les frères Hackett, David Cross, Bill Sherwood, Nick Magnus, Davis Jackson, Richard Sinclair , Bernardo Lanzetti et bien d’autres encore, associant leurs talents qui d’instrumentistes et/ou de chanteurs, qui de compositeurs, à cette grande fresque sonore.

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L’intro, « All Roads Lead To Rome » est certes grandiose mais non dénuée d’un certain pompiérisme avec son entrée en imitation d’orgue d’église et ses harmonies un peu convenues, mais c’est toujours un plaisir d’entendre la guitare de Steve Hackett. Plus intéressant à mon goût est « Beaten Paths » avec la belle voix de Bernardo Lanzetti, très italienne même si le chant est en anglais ! La troisième piste et dernière inédite, « Vertical Illusion », est un instrumental calme, plutôt hackettien.

On attaque la suite des morceaux retravaillés / réarrangés et on repart sur un mode volontiers grandiloquent, mais bien dosé, pour symboliser la fondation légendaire de Rome : « April 21st, 753 B.C. » (désolé, je n’ai pas pu trouver l’heure exacte …). Le rythme marqué à la caisse claire (qui rappelle inévitablement un certain Boléro avec quelques différences) donne un caractère martial à la musique. Tout autre est le rêve de l’empereur Caracalla (« Caracalla’s Dream »), dominé par la basse délicate de Richard Sinclair et la flûte aérienne de John Hackett, avec même un intéressant passage central où les deux jouent à l’unisson. Beau moment musical, que prolonge d’ailleurs « Reflections ».

C’est au tour de David Jackson de faire entendre ses envolées au sax (et sauf erreur de ma part à la flûte) dans « A Mankind Heritage ». Vous y reconnaitrez la maîtrise et l’inspiration du grand musicien de VDGG ! Peut-être le meilleur titre de l’album. « Of Fate and Glory » est une ballade où on peut entendre quelques sonorités genesiennes et un excellent chant en italien, avec en prime la voix de Joanna Lehmann, Mme Steve Hackett à la ville, en narratrice. Le senatus populusque romanus« S.P.Q.R. » – emblème du pouvoir politique romain, renoue avec une musique assez grandiose, composée comme le précédent par Steve Hackett.

« The Oracle » et « 476 A.C. », composés par David Cross sont évidemment l’occasion d’écouter son inimitable style violonistique (souvenez-vous de « Lark’s Tongues In Aspic »). Le deuxième, évoquant la date qui marque la fin de l’Empire Romain d’Occident est sous-titré Song for Wetton, une élégie donc. « Invictus » évoquera à certains un nom de film de Clint Eastwood, à d’autres plus littéraires un poème de l’anglais W.E. Henley (en 1900). Ici c’est une piste due à David Jackson, sombre et énergique avec sa polyrythmie, d’excellentes progressions harmoniques, et ses incroyables riffs de sax. Comme quoi le sax n’est pas qu’un aimable instrument de smooth jazz et d’easy listening

« Proemium », qui débutait l’album précédent, clôt celui-ci par une cadence pianistique qui semble directement sortie d’un concerto pour piano romantique russe, composé et (j’imagine) joué par Nick Magnus. Superbe !

Voilà un album digne de la Cité Eternelle, mené avec brio par un exceptionnel groupe de musiciens sous la houlette de Vincenzo Ricca, qui réussit à donner une grande cohérence à ce qui aurait pu n’être qu’une compilation de velléités individuelles … Et n’oubliez pas : Vinum et musica laetificant cor et super utraque dilectio sapientiae !

Formation du groupe

Vincenzo Ricca / claviers, chant, basse - Et: - Steve Hackett / guitares électriques - Nick Magnus / piano, claviers - David Jackson / saxophone & flûte - John Hackett / flûte - David Cross / violon électrique - Bernardo Lanzetti / chant - Richard Sinclair / chant, basse fretless - Billy Sherwood / basse, batterie - Avec: - Franck Carducci / guitare & basse 12 cordes - Paolo Ricca / guitare électrique - Roberto Vitelli / basse, pédales Moog Taurus - Daniele Pomo / batterie - Jerry Cutillo / flûte - Giorgio Clemetelli / guitare acoustique - Mauro Montobbio / guitares électriques et classiques - Luca Grosso / batterie - Lorenzo Feliciati / basse - Riccardo Romano / piano - Danilo Chiarella / basse - Maurizio Mirabelli / batterie - Invités spéciaux: - Joanna "Jo" Lehmann Hackett / chant - Francesco Di Giacomo / chant

🌍 Visiter le site de The Rome Pro(g)ject →

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Par VLYES

5 sur 5

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