The Cure

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(4.3 sur 5) / Autoproduction
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Instrumental Métal Progressif

Maxime Even est un guitariste français qui propose aujourd’hui avec son nouvel album ‘The Cure’ un projet ambitieux et personnel. Inscrit dans un style globalement axé sur le Metal Progressif instrumental, le disque s’aventure par endroits vers d’autres territoires. Maxime a eu la gentillesse de répondre à nos questions pour évoquer son parcours, ses influences et nous éclairer un peu plus sur ‘The Cure’.

ProgCritique : Bonjour Maxime. Tout d’abord un grand merci d’accepter de répondre aux questions de ProgCritique pour la sortie de ton album ‘The Cure‘. Peux-tu te présenter à nos lecteurs en quelques mots : Quel est ton parcours musical, quels apprentissages as-tu suivi, as-tu participé à d’éventuelles collaborations avec d’autres musiciens ?

Maxime Even : Bonjour David, merci de me recevoir ! Ça fait chaud au cœur. Je suis un musicien indépendant, guitariste de session et compositeur passionné. J’ai commencé la guitare électrique un peu par hasard en tombant sur une compilation de guitar heroes (Joe Satriani, Steve Vai et Richie Kotzen) que l’ex-copain de ma sœur avait laissé traîner… C’était en 2005, j’avais 14 ans à l’époque. Essentiellement autodidacte, j’ai pris quelques leçons avec Stéphane Delrieu de la MAI de Nancy dans mon adolescence, puis je me suis plongé corps et âme dans les cours de la Berklee School of Music. Les derniers projets auxquels j’ai participé sont l’album d’Alma Elste « Welcoming the Maze » (dream pop) et la B.O. d’un court métrage sur le Japon « Jitensha » (ambient/folk). J’ai également un groupe de variété française « Présage » dans les cartons, dont quelques titres devraient sortir cette année.

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Maxime Even

ProgCritique : Quelles sont tes influences musicales, les éléments fondateurs et ceux qui ont servi à te forger ton identité ?

Maxime Even : Monomaniaque par nature, et toujours très attaché au format CD, mes principales influences sont des albums plus que des groupes; je peux citer «Awake» de Dream Theater, «Red» de King Crimson, «Guitar Shop» de Jeff Beck, «Fire Garden» de Steve Vai, «Freak Guitar» de Mathias Eklundh… mais aussi «Return to Forever» de Chick Corea, «Sgt Pepper» des Beatles, «Thriller» de Michael Jackson, «Geogaddi» de Boards of Canada, le Sacre du Printemps de Stravinsky par Pierre Boulez, on pourrait y passer une éternité ! Je regrette la perte progressive du format album, qui je trouve reste la meilleure manière d’aborder un projet : essayer de saisir l’intention des artistes, elle-même ancrée dans une temporalité fixe. Un album reflète aussi la façon de faire d’une époque… c’est un bout d’histoire.

ProgCritique : Parlons maintenant un peu plus précisément de ‘The Cure‘. Déjà, comment définirais-tu ton style pour quelqu’un qui n’a jamais écouté ta musique ? On trouve selon moi une forte coloration Metal Progressif, mais enrichi d’autres composantes, issues notamment de la musique classique.

Maxime Even : Je pense que c’est avant tout un album de guitare ! Ceci étant, au vu du style de production et des quelques influences extrêmes, la casquette de Metal Progressif semble la plus adaptée. J’ai toujours été admiratif de la façon dont est construit «Shut up and play yer guitar» de Frank Zappa, un album qui n’a pas réellement de limite de style, mais dont les arrangements sont contenus à la manière d’un concerto dans le classique : les autres instruments sont surtout présents pour « sublimer » l’instrument principal. C’est aussi ce que je tente de reproduire depuis l’album précédent « The Rite ».

ProgCritique : Comment s’inscrit ‘The Cure‘ dans ta discographie ? Il s’agit de ton troisième album je crois, assure-t-il une continuité avec les précédents ou représente-t-il une rupture ? Par ailleurs, bien que intégralement instrumental, l’album semble exprimer des sentiments personnels, voire raconter une histoire autobiographique. Peux tu nous parler de cet aspect ?

Maxime Even : « The Cure » est effectivement mon troisième album ! L’intention pour cet album est différente des deux précédents, qui sont plus éthérés. J’ai choisi de mettre en musique les émotions que j’ai pu ressentir ces dix dernières années, émaillées par le deuil. C’est un album sur le passage à l’âge adulte, la fin de l’innocence. Je construis toujours mes albums avec le souci de créer une boucle, en liant le début et la fin. En ce sens, il n’y a pas vraiment de continuité, chaque projet représentant une étape dans ma vie.

ProgCritique : Peux-tu nous parler des musiciens présents sur le disque ?

Maxime Even : Le groupe est composé de James Knoerl (Aviations, The Anchoret) à la batterie, Jérémy Garbarg (Quatuor Arod) au violoncelle et Florian Perucki (Slun) au piano. Il s’agit d’un groupe de studio, il n’y a pas eu de répétitions à proprement parler. J’ai travaillé avec chaque musicien séparément, en prenant comme base une démo. Les parties de batteries ont été enregistrées directement par James dans son studio à Brooklyn, puis j’ai enregistré le violoncelle, le piano et les guitares lors de sessions à Paris et à côté de Chartres. L’enregistrement de l’album a été très long, s’étendant sur 18 mois au total !

ProgCritique : Ce qui a suscité mon intérêt pour le disque à la première écoute est son côté ambitieux, bâti sur des compositions riches avec ce qu’il faut de complexité, des arrangements et une production haut de gamme qui varient les instruments et les sonorités. Le côté production semble être particulièrement important pour toi, quelle ambiance ou coloration sonore voulais-tu donner à ‘The Cure‘ ?

Maxime Even : Merci pour ces compliments ! J’ai tout fait pour que l’album sonne le mieux possible à mon oreille. J’aime l’idée d’une production moderne avec un son un peu à l’ancienne, typé fin nineties. Quand il y a autant de notes à la fois et d’instruments, l’idée est de faire de l’espace pour tout le monde. Je ne voulais pas que l’on entende uniquement la guitare, car l’harmonie est pour moi tout aussi importante. En effet, plus on entre dans l’expérimentation, plus il faut cadrer harmoniquement le contexte et pour cela un bon mix est crucial. J’ai été beaucoup aidé par Jens Bogren dans la phase finale du mixage.

ProgCritique : Parlons un peu guitare ! On peut entendre dans l’album (et voir sur la vidéo de « Ghost« ) que tu pratiques plusieurs techniques (Metal shredder rapide et précis au médiator avec du tapping, Blues licks sur Stratocaster, Finger Picking en acoustique, etc…). Par ailleurs, tu sembles bien maîtriser la théorie musicale. Ces différentes techniques sont-elles sources d’inspiration pour composer, ou bien adaptes tu les techniques à des morceaux qui sont composés indépendamment de l’interprétation finale ?

Maxime Even : C’est une très bonne question ! Je n’ai pas de recette toute faite, mais effectivement certaines techniques que je travaille permettent de composer naturellement des parties. En travaillant des bouts de gammes d’une certaine façon avec un certain doigté, tu peux toujours arriver à tomber sur un arpège donné et donc intégrer cet arpège dans une suite d’accords. L’idéal serait de convertir tous les exercices que l’on s’impose en musique, mais ce n’est pas toujours faisable !

ProgCritique : Pour rester sur les guitares : Quel matériel utilises-tu ?

Maxime Even : J’utilise principalement des guitares japonaises de la marque ESP, le modèle Horizon. J’ai testé pas mal de marques de micros différentes, mais j’ai une petite préférence pour les Seymour Duncan passifs. Pour les parties avec moins de gain j’ai une Stratocaster Fender vintage des années 80, et pour l’acoustique une Takamine moderne. Côté amplis, j’adore le son typé british « Hot Rod » de la fin des années 80, modernisé par Friedman ou Soldano. Pour le clean, je préfère le Fender Bassman Tweed, en version combo. Pour le live et les enregistrements j’utilise l’Axe FX II de Fractal Audio depuis plusieurs années, c’est facile à utiliser et ça sonne tout de suite. Globalement je ne suis pas un malade de matos, j’ai des amis bien plus calés que moi pour me conseiller !

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Maxime Even

ProgCritique : Il y a dans ‘The Cure‘ plusieurs moments inattendus. Par exemple : l’accompagnement de cordes sur « When You’re There« , l’arrangement guitare classique/Piano de « The Finest Leave First« , le piano très intimiste tout juste audible de « Brick Lane« , les percussions de « Void« , etc… Tous ces éléments sont au service d’une histoire ou sont-ils présents pour marquer des ruptures avec le côté guitare Lead électrique?

Maxime Even : J’aime composer pour d’autres instruments, et je pense que les interludes ont tout autant d’importance que les morceaux principaux ! Effectivement, il y a un fil conducteur, un leitmotiv que j’introduis dans « Rewind« , et que je réutilise durant tout l’album notamment dans « Brick Lane » en ré-harmonisant les accords qui l’accompagnent. Même si ce n’est pas un album concept à proprement parler, les morceaux sont liés par une histoire commune racontée au travers de cette phrase mélodique qui se répète.

ProgCritique : Par ailleurs, tu n’hésites pas à utiliser des harmonies aventureuses ou des sonorités un peu rugueuses, voire de la dissonance. Est-ce aussi dans un souci de sortir des schémas traditionnels des guitar heros ?

Maxime Even : J’ai essayé effectivement d’aller chercher des sonorités différentes, des modes moins typiques, des accords moins classiques… mais je ne pense pas que ce soit pour sortir d’un schéma traditionnel. Les gammes exotiques sont présentes depuis toujours dans la musique progressive ! Parfois une simple note, un simple intervalle peut transformer complètement une partie. J’aime jouer avec l’instabilité des gammes non diatoniques. Lier une émotion à un mode, qu’il soit classique ou inhabituel, là réside la réelle difficulté.

ProgCritique : Attention, question difficile : Une musique instrumentale, riche, aventureuse, … Tu as conscience que tu es aux antipodes des standards populaires actuels qui se veulent courts, simplistes, épurés ? Comment alors attirer le public vers ton travail ?

Maxime Even : Si tu as la réponse je suis preneur ! Je suis conscient que la forme, tantôt dissonante, tantôt extrême, résolument centrée sur la guitare réduit cet album à une niche. Mais je n’ai pas pour autant de désir de m’imposer des limites pour le futur. J’aime cette idée que ce projet solo reste un bac-à-sable, libre et sans concession. Peut-être arriverais-je à attirer un public curieux, via d’autres projets comme mon groupe de variété, ou bien la musique à l’image par exemple. Et pourquoi pas à l’aide d’interviews dans des blogs de mélomanes !

ProgCritique : Quels sont tes projets pour la suite ?

Maxime Even : J’ai plusieurs idées pour la suite. J’ai récemment fait l’acquisition d’une Edwards 8 cordes, j’explore ce nouvel instrument dans l’espoir d’en sortir quelque chose prochainement… sans partir dans le Djent “Meshuggéen”. Même si je l’avoue, la tentation est toujours forte. Jouer plus bas laisse plus de place dans l’arrangement pour des orchestrations plus complexes, je réfléchis à intégrer d’autres instruments que les cordes pour le prochain opus.

ProgCritique : Merci infiniment pour tes réponses Maxime.

Maxime Even : Merci à toi, et à très bientôt j’espère !

Je suis sûr que la lecture de cette interview vous a donné envie d’aller écouter l’album de Maxime, alors n’hésitez pas, il est disponible partout !

Formation du groupe

Jeremy Garbarg : Violoncelle - Florian Perucki : Piano, Saxophone - Allan Ouazana : Percussions - James Knoerl : Batterie - Maxime Even : Guitares, Basse, Oud, Glockenspiel

🌍 Visiter le site de Maxime Even →

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