L’album ‘Fearless’ de Crown Lands a été publié il y a quelques mois, et l’équipe de ProgCritique ne pouvait pas passer sous silence cette sortie majeure de 2023 dans l’univers du Rock Progressif.
J’ai découvert le groupe il y a 2 ans de cela à la faveur d’une vidéo live sur YouTube, et j’ai été complètement scotché par le jeu du duo. Car oui, il s’agit bien d’un duo : Cody Bowles à la batterie et au chant, et Kevin Comeau à la guitare, à la basse et aux claviers. Considérant la complexité et la richesse de leur musique, leur prestation en concert relève de la prouesse : alors que Cody joue sur sa batterie des rythmes qui vont bien au delà du 4/4 traditionnel et chante en même temps (à l’occasion, il officie également à la flûte), Kevin gratte une guitare double manche (guitare six cordes et basse), envoie quelques notes sur un clavier lorsqu’il parvient à se libérer une main, utilise un pédalier pour les basses, tout en balançant d’avant en arrière son imposante chevelure.
Ce qui pourrait à priori ressembler à un numéro relevant seulement de la technique instrumentale, exprime en fait une musique profonde et complexe largement inspiré du trio de légende Rush.
Ça y est, le mot est lâché, et dès les premières notes de ‘Fearless’ la référence saute aux oreilles. Le duo (également originaire du Canada) ne cache pas son admiration et l’impact de ce groupe sur sa musique, ne ratant jamais une occasion de leur rendre un hommage appuyé.
En l’espace de 2 années, j’ai pu assister à l’évolution de Crown Lands et ‘Fearless’ constitue indiscutablement un aboutissement de très haut niveau.
Comment ne pas penser à l’”Overture” de ‘2112’ dès le premier titre “Starlifter: Fearless Pt. II” (oui, la Part II arrive avant la Part I, c’est très Prog!) ? Cet Epic de 18 minutes est une succession de sons de claviers de l’espace, de puissants riffs de guitare, d’arpèges à la guitare acoustique, de chant poussé dans les aigus (coucou Geddy Lee!), d’unissons guitare-batterie, d’instant Ambiant avec flûte, d’histoire de science-fiction, de voix synthétiques, de sons de cloches. L’amateur de Rock Progressif des années 70 admirateur de Rush nage dans le bonheur.
Retour à un format plus conventionnel sur “Dreamer Of The Dawn”, un rock très enlevé qui fait référence au Rush des années 80, magnifié par un excellent refrain. “The Shadow” avec son penchant un peu plus Heavy est à nouveau une totale réussite, et semble suivre l’évolution du son de Rush au fur et à mesure des années.
Suivent quelques titres déjà connus des amateurs du groupe puisque figurant sur l’album live ‘Odyssey Vol.1’ de 2021, ici en version studio. A commencer par le très ramassé “Right Way Back”, morceau qui penche un peu plus vers le Hard Rock avec quelques descentes de toms remarquables, même si l’on ressent une différence de production avec les morceaux précédents.
“Context: Fearless Pt. I” était également connu et trouve toute sa place ici. Il vient faire écho à la Part II du début du disque. A nouveau le groupe déroule sur presque 8 minutes son savoir-faire Prog sur l’écriture, l’alternance des ambiances, la brillante interprétation. Étrangement, j’y ai trouvé une vibe années 90 correspondant au début du mouvement grunge, le titre sonnant par instants comme le groupe Mother Love Bone.
“Reflections” débute sur une ambiance cinématographique avant d’évoluer vers un style proche des albums type ‘Moving Pictures’ / ‘Permanent Waves’.
L’ambiance change sur “Penny”, morceau entièrement instrumental joué en picking à la guitare acoustique par Kevin Comeau, idéal pour laisser l’esprit s’égarer. Magnifique!
On a beaucoup parlé de Rush, mais c’est l’esprit de Led Zeppelin qui plane (Ah! Ah!) sur “Lady Of The Lake”. C’est à nouveau une belle réussite alternant intelligemment acoustique et électrique.
La qualité est maintenue jusqu’au bout avec “Citadel”, titre de clôture qui voit l’apparition inattendue d’un piano. Le morceau gagne en intensité jusqu’au solo de guitare final et le retour d’une ambiance quasi martiale.
Crown Lands frappe un grand coup avec ‘Fearless’, ce qui leur a valu une attention particulière de la communauté Prog. Certes, le groupe est très marqué par l’influence de Rush, mais avouons-le il y a pire comme modèle. Et plutôt que d’être une faiblesse j’y vois une force : La liberté. La liberté de créer, à l’instar de leurs idoles, des titres de 18 minutes aux antipodes des chansons formatées pour les playlists des services de streaming, de raconter des histoires de véhicules de l’espaces, de luttes des peuples, ou d’inclure un titre instrumental à la guitare seule de 4 minutes.
Reste à voir comment va évoluer le groupe. Cody Bowles a déjà évoqué la possibilité d’intégrer un batteur, au moins pour les prestations live, pour pouvoir se concentrer sur le chant. Au vu de la trajectoire déjà engagée, ne doutons pas que le groupe va continuer à progresser et pourrait encore nous surprendre à l’avenir.
Formation du groupe
Kevin Comeau : Guitare, Basse, Claviers - Cody Bowles : Batterie, Chant
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