Le croiriez-vous, et pourtant je dois bien l’avouer, je ne connaissais absolument pas Saqqarah, groupe vannetais, et donc des compatriotes puisque je suis moi-même morbihannais … Comme le disaient Luc et Matthieu dans les Evangiles selon eux-mêmes, Nul n’est prophète en son pays … C’est d’autant plus regrettable que ce groupe ne débute pas vraiment puisque formé en 1992. Du combo originel, Patrice Mauvieux et Dominique Renault sont seuls à poursuivre l’aventure musicale, concrétisée en 1996 par la sortie de Genèse, et près de dix ans plus tard par The Awakening. Et Il faudra attendre près de 20 ans de plus pour que j’écoute The Runaway. En ce qui concerne le line-up Louis Mira (basse) et Jean-Luc Le Pogam (chant) complètent le quatuor.
S’il est communément admis que le Morbihan est un endroit magnifique (un peu de chauvinisme ne peut pas nuire), il me semble que le groupe vannetais ne tire pas son nom de sa région natale, mais d’une contrée sise quelque part au sud-est dudit département breton. Cela dit une première écoute me confirme que la musique de The Runaway n’est pas spécialement d’inspiration bretonne ou égyptienne, mais se nourrit d’influences plutôt anglaises comme par exemple Camel, Marillion, Pink Floyd.
La courte introduction « Never Care – 1 » lance l’album dans une excellente ambiance façon « Pigs On The Wing ». Si l’album a pour thème la guerre, « Departure » n’en est pas encore au fracas ou au chaos, mais délivre une balade plutôt calme et sereine. La toute fin avec son tambour militaire laisse toutefois entrevoir des sonorités plus sombres à venir. Ce qui ne manque d’ailleurs pas d’arriver dans le solide et martelé « Dog Tag », un hard rock mélodique de belle facture, dont le tempo s’accélère et une guitare acérée vient clore cet excellent morceau.
« Return Home », plus léger, apporte quelque lumière tandis que les voix déclamées et le jeu de guitare évoquent Pendragon. « Traders Of Death », le négoce de la mort mis en musique, renoue avec une ambiance oppressante, contrebalancée par un refrain et des passages en harmonies majeures. Mais pour qui sonne le glas ? Une belle balade acoustique floydienne, « Funerals » y répond. Simple et efficace !
Un neo prog aux ambiances contrastées, « Ghost Plane » nous fait aborder la deuxième moitié de l’album, la plus intéressante sur le plan musical de mon point de vue. Par ailleurs en parcourant la discographie de Saqqarah, vous découvrirez que ce morceau reprend une ancienne pièce de leurs débuts, « L’Egypte », parue sur un EP de 1994 intitulé Peti Tra Eref Su (*)
Après une intro éthérée qui nous met dans l’attente, le riff soudain et affirmé de « Crazy » fait décoller la musique. La transition est superbe. Au fil de la musique les vocaux prennent de la puissance et des accents à la Peter Gabriel version hard rock. Invité pour l’occasion, Pat O’May, adepte du hard rock celtique (pour faire court) en profite pour venir nous régaler d’un solo de guitare qui justifie à lui seul le titre du morceau !
Temps fort de l’album, la longue suite en quatre parties, « The Mirror » qui résume parfaitement, tout en l’amplifiant, l’univers musical de Saqqarah et sa capacité à varier les idées musicales et les ambiances sonores. J’aime particulièrement le passage central, très poétique et qui met bien en valeur la superbe voix de Jean-Luc Le Pogam.
Après ce morceau de bravoure, « Never Care – 2 » reboucle sur la piste introductive, et on s’attend à terminer l’aventure dans cette ambiance blues rock qui devient carrément festive sur la fin. Et bien pas du tout, reste à venir un long final, « The Watcher ». Cela démarre par une ambiance de désert égyptien (ou pourquoi pas de lande bretonne à la tombée de la nuit ?), d’où émerge peu à peu un rythme de marche lente et inexorable. La musique est habitée une nouvelle fois par des vocaux très expressifs, et puis tout s’emballe et prend de l’altitude dans le dernier tiers pour ne laisser que le vent …
Le Saqqarah nouveau signe un retour de grande classe avec ce superbe The Runaway (**). Un très beau travail de composition, un quatuor de musiciens expérimentés et talentueux, le tout au service d’une musique élaborée mais directement accessible. Voilà de quoi passer un excellent moment musical ! Quant à moi, je rajoute Saqqarah à ma shortlist (provisoire) de musiciens bretons : Dan Ar Braz, Seven-Reizh (Claude Mignon), Didier Squiban, qui chacun à leur façon portent dans leur musique une certaine universalité bienvenue dans ces temps compliqués.
(*) La discographie complète de Saqqarah est disponible sur les plateformes musicales et sur le site du groupe.
(**) https://saqqarah.bandcamp.com/album/the-runaway
Formation du groupe
Patrice Mauvieux : guitares, synthés - Dominique Renault : batterie - Louis Mira : basse - Jean-Luc Le Pogam : chant, guitare, percussions
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