The Ageless Gate

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(4.1 sur 5) / Autoproduction
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Rock Progressif Rock Symphonique

Instrument incontournable du quatuor/quintette à cordes de l’orchestre symphonique, doté d’une tessiture impressionnante et d’un timbre généreux, le violoncelle reste néanmoins souvent cantonné au registre de basse ou d’alto, « coincé » entre les violons et la contrebasse. Autant le violon est largement présent dans toutes sortes de genres musicaux, autant la contrebasse s’est émancipée notamment via les orchestres de jazz, autant le violoncelle n’a guère quitté les ensembles de cordes. Bach l’a libéré et magnifié dans ses extraordinaires sonates pour violoncelle seul, et qui ne connait le thème d’introduction de la première de ces sonates ? Beethoven, Brahms, Debussy et même Chopin lui confieront quelques sonates avec piano. Etant grand fan d’Henri Dutilleux, je ne manquerai pas de citer le moderne et magnifique concerto pour violoncelle et orchestre, composé pour l’inégalable Mstislav Rostropovitch, et intitulé « Tout un Monde Lointain ». Tout ça pour dire que quand il quitte son rôle d’accompagnant pour prendre le devant de la scène, le violoncelle devient un tout autre instrument.

Il y a évidemment déjà un bon moment que vous aviez deviné que Joost van Dongen a quelque chose à voir avec le violoncelle ! D’ailleurs la pochette de son album n’est autre qu’un chevalet de violoncelle. Bien vu d’ailleurs que cette perspective qui évoque une pile de pont suspendu avec ses haubans …. Un petit côté Golden Gate ? Violoncelliste accompli, Joost a composé entre-autres des bandes son et participe à l’aventure ludique et expérimentale Cello Fortress que je vous laisse découvrir …

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Ce premier album, « Ageless Gate », conte en 13 parties une histoire répartie sur 3 siècles, qui démarre par un ancien artefact et termine sur une porte ouverte sur autre monde. « Ageless Gate » est surtout l’occasion d’écouter vraiment autre chose : du violoncelle surtout, dans des pièces polyphoniques, ou accompagné de divers instruments : violon, voix, guitare, basse, batteries et percussions. On débute aux temps anciens de l’histoire par « Sandrider », sorte de mouvement de sonate en trio, ou chaque ligne de violoncelle à sa vie propre : mélodie principale (et quelques étonnants glissandi en intro), accompagnement en sextolet qui enjambe allégrement 2 octaves, et ligne de basse en pizzicati. Un très bel exemple de l’art de Joost van Dongen que cette pièce plutôt néo-classique. Changement de période dans l’histoire – les 3 pistes suivantes se déroulent en 1886 (d’après la poche du CD), et surtout de style musical, avec « The Daysailer and the Night Cave » – une longue intro plus électro-planante et il faut 3 mn avant l’entrée du violoncelle, et puis on renoue avec le style de la première piste pour cette fois un duo de violoncelles. Nouveau changement de style avec l’élégant « Hear Her Typewriter Humming » et son rythme tapé à la machine ( !). Essayez d’en faire autant avec un logiciel de traitement de texte ! La partie de violoncelle est plus chantante et même dansante, et on y entend un passage chanté (voix féminine).

Après un court intermède planant un peu sombre faisant entendre diverses cordes en accompagnement du violoncelle (« A Century Sails By »), on arrive en 1959. « The Light Deep Down » délivre une musique aérienne, même si la ligne de violoncelle reste dans un registre alto, mais les vocalises féminines font le travail ! Nouvelle pièce en trio de violoncelle avec « Tensor », tandis que « The Master Waits » déroule une marche lente et pesante au deuxième violoncelle pendant que le premier déclame la mélodie. Avec la piste suivante (« Then The Halls Were Empty… and I Turned It On! »), la musique se fait encore plus sombre et pesante. « Grom » est un nouveau trio sur le mode déjà décrit plus haut. Le court « A Century Flies By », vient un peu détendre l’atmosphère sur des harmonies plus larges et un duo violon / violoncelle de toute beauté.

Nous voici propulsés en 2061 et « Approach of the Derelict Research Station » ne nous apporte pas une atmosphère plus radieuse pour autant. Le titre de la dernière piste, « Lament », n’appelle pas non plus à l’optimisme, un dernier duo de violon (plutôt au second plan) et violoncelle, une dernière note un peu lugubre à l’unisson … Fin de l’histoire et de cette suite symphonique en 13 parties (à ProgCritique nous ne sommes pas superstitieux) !

Au-delà de l’utilisation peu commune du violoncelle, comment qualifier la musique de Joost van Dongen et de son « Ageless Gate » ? Pas facile, mais je tenterais un néo-classicisme avec des touches de minimalisme (on peut penser à Philip Glass), et bien sûr un rock progressif un rien inhabituel. En tous cas, comme je le soulignais plus haut, il y a ici de quoi écouter quelque chose de vraiment différent, à la fois dans l’écriture et le rendu sonore ! Il y a encore beaucoup à faire avec le violoncelle et l’expérimentation musicale, et je suis certain que notre violoncelliste et compositeur Néerlandais ne manquera pas de nous le faire savoir dans les temps qui viennent !

Formation du groupe

Joost van Dongen : violoncelle, programmation, glockenspiel (4) - - Avec : Marissa Delbressine : chant (4) - Thomas van Dijk : guitare acoustique (4), guitare basse (6) - Mijnke van der Drift : violon (11, 13) - Chris Einspahr : narration - John Maasakkers : batterie (2, 6, 9, 11), percussions (2, 9) - Joyce Scheeren : chant (6)

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