Avec ce troisième album studio, le groupe reste fidèle à ses convictions et à ses thèmes de prédilection, invitant les auditeurs à réfléchir sur le futur de l’humanité et à leur place dans l’univers. Selon les propres mots de Simon Phillips, cofondateur avec le guitariste DarWin (DW), il s’agit « d’amener les gens à réfléchir à ces questions, selon leurs propres termes ». Une déclaration qui résume parfaitement l’essence même de ce projet musical à l’initiative en 2015 des deux artistes, rejoints par la suite par le bassiste/chanteur Matt Bissonnette (David Lee Roth, Elton John), puis par le fantastique guitariste Greg Howe (issu de la fameuse écurie de shredders de Mike Varney avant de prendre un virage plus jazz rock) et, depuis 2022, par la jeune bassiste indienne prodige Mohini Dey. Pour ce nouvel album, les cinq musiciens sont également accompagnés sur certains titres par d’autres artistes tout aussi talentueux, tels que le claviériste Derek Sherinian (que l’on ne présente plus), le claviériste Jullian Pollack (compositeur et producteur américain plutôt associé à la musique jazz et hip hop) ou encore le guitariste Jesse Siebenberg (au sein de Supertramp depuis 1997).
Musicalement, DarWin a toujours privilégié une volonté d’écrire des titres courts et bien calibrés, avec une spécificité de taille : un son puissant et un groove massif, contrebalancés, dans un équilibre parfait, par de magnifiques harmonies et un chant tout simplement rock. Une approche qui rend leur musique immédiatement très accessible, indépendamment de la virtuosité vertigineuse de ces musiciens accomplis. Évitant tout excès de démonstration technique, le groupe fusionne avec intelligence différents univers, au croisement du jazz rock, du rock, du progressif, du hard rock ou encore de l’AOR. Et de ce fait, la référence à un Toto plus musclé, qui est souvent de mise, paraît bien trop restrictive. Une chose est certaine ; dès « Soul Police« , le titre d’ouverture de ce nouvel opus, DarWin réitère cette ambition de proposer des titres énergiques, toujours foncièrement racés et portés par de sublimes harmonies vocales. Dimension également illustrée à la lettre par le très positif « Imitation Suede« , tout comme par « Inside This Zoo » qui, avec cette intro soignée de Greg Howe et ces plans travaillés, élève encore subitement d’un cran le niveau de jeu. Ou encore, par le furieux « Be That Man » sur lequel une puissance réellement prog metal côtoie un refrain hyper mélodique, créant ainsi un remarquable contraste.
En marge de ces titres, le groupe nous offre une pièce centrale, mini épique en forme de triptyque et grand temps fort de ce disque. Le très court instrumental « One Step on the Sun« , aux accents dramatiques, donne le ton, sur une partition très shredding. Lui succède un « Five Steps on the Sun« , d’une ampleur spatiale, sur lequel les claviers de Jullian Pollock offrent une alternative très intéressante au style de Derek Sherinian, colorant de manière très évanescente la composition. Une musique qui traduit des sentiments ambivalents, avec pour toile de fond l’adieu à un monde en perdition et, de manière concomitante, l’espérance d’un nouveau monde à construire par-delà les étoiles (« A hundred years technology has blown the world insane. A thousand planet refugees who left to start again. A million souls ahead of us they’re coming into view. A billion souls behind us I’m praying for you too / Cent ans de technologie ont rendu le monde fou. Mille réfugiés planétaires ont tout quitté pour recommencer. Un million d’âmes devant nous, elles apparaissent à l’horizon. Un milliard d’âmes derrière nous, je prie aussi pour elles. ». À noter également sur ce titre un long et magnifique solo de Greg Howe, entre jazz fusion et shredding (qui évoque par moments le style de Tony MacAlpine, les deux guitaristes ayant suivi une trajectoire musicale relativement similaire même si le second est resté plus typé metal). Enfin, l’instrumental « The Sun« , moment de grâce, avec une intro et un final acoustiques de toute beauté, presque ambient, grâce à la guitare de Jesse Siebenberg et aux claviers de Julian Pollack, et, au milieu, une composition plutôt jazz rock d’une grande sensibilité. En deux mots comme en cent, un voyage vers le Soleil réellement envoûtant.
« Five Steps on the Sun » ou l’art de concilier, avec réussite, musique accessible, intelligence du propos et exigence technique.
Formation du groupe
DarWin : guitares - Simon Phillips : batterie & percussions Avec : - Mohini Dey : basse - Derek Sherinian : claviers (1-3,9) - Greg Howe : guitares solo - Matt Bissonette : chant - Julian Pollack : claviers (4-8 ,10) - Chariya Bissonette : chœurs (1,5,8,10) - Jesse Siebenberg : guitares acoustiques, chœurs (3,5-8,10) - Andy Timmons : guitare solo (8)