Dans la galaxie foisonnante des Samurai of Prog et leurs nombreuses déclinaisons, on connait évidemment les contributions musicales de nos deux protagonistes, Rafael Pacha et Kimmo Pörsti. Mais depuis peu, ces deux musiciens expérimentés se sont associées sous la marque Pacha & Pörsti dans un duo où se rassemblent deux personnalités a priori très dissemblables, du moins si on s’en tient à leurs origines, espagnole pour l’un et finlandaise pour l’autre. Dans le précédent Views From The Inner World, une des clés de l’étonnante alchimie de l’album réside dans le fait que chacun des deux musiciens vient souvent se positionner sur le territoire de l’autre, gage ultime d’une complicité qui n’est plus à prouver. L’album est majoritairement instrumental, et quand ce n’est pas le cas, la branche féminine de famille Pörsti se charge en grande partie du chant. La tonalité est principalement folk rock, mais dans un style particulièrement élaboré et souvent symphonique.
« Sailor’s Tale », cosigné des deux, est un bon exemple de traitement symphonique d’un matériau d’inspiration folklorique. Les vocalises de Laura Pörsti dans le registre soprano donnent une étonnante dimension à ce premier morceau. Superbe ! Et ça ne fait que commencer. Le suivant, « Diving Into Infinity » offre un nouveau thème traditionnel d’abord exposé au hautbois avant que Paula Pörsti ne prenne la parole. Décidemment, on chante merveilleusement bien dans la famille Pörsti. Après le passage chanté la musique prend de l’ampleur autour des guitares et des claviers, avant une ultime exposition du thème initial, toute en mélancolie. « Tara’s Joy In The Beach», proposé par Rafael Pacha, semble évoquer un chien jouant sur la plage, si j’en crois l’illustration figurant sur le livret du CD. Hypothèse plausible, et j’ai d’ailleurs eu dans ma famille un chien dénommé ainsi. Les nombreux rythmes dansants et syncopés qui parsèment le morceau et les traits joyeux de mandoline, bouzouki, guitare et flûte rendent cette pièce irrésistiblement dansante.
Nouvelle pièce de Rafael, également chantée, « The Island Of Lotus-Eaters », plus ‘sérieuse’ que la précédente, superbement arrangée, donne à nouveau entendre à sa toute fin les étonnantes vocalises de Laura Pörsti. Pour évoquer la fille de Poséidon, « Charybdis », Alessandro di Benedetti accompagne le duo au piano. Pour la piste-titre, « Sea Of Mirrors », Marek Arnold rejoint à son tour le duo pour nous offrir une mélodie bien charpentée et très mélancolique au sax. La mini-suite « Fascination », aligne quatre parties contrastées, menées par le chant d’Alejandro Suarez, les mélopées de Rafael et Marek à la guitare et au sax, et un jeu de batterie de Kimmo particulièrement inventif. « Lead, Silver and Gold (Song for Cadiz) » débute sur une savoureuse alternance de motifs de 4 et de 5 notes, créant un agréable balancement – l’irrégularité des vagues qui viennent baigner la célèbre cité portuaire, une des (innombrables) merveilles de l’Andalousie ? Beaucoup de poésie dans ce morceau. « Shipwreck », plus sombre et même parfois inquiétant, laisse parler les flûtes et le sax d’Olli Jaakkola. Le final en 3 parties, « House Of The Light », composé par Kimmo, égrène une belle et noble mélodie, d’abord à la flûte, ensuite au chant. L’accélération finale reprend la mélodie introductive dans un mouvement plein d’allant et de charme.
Le monde marin avec ses paysages, ses personnages et ses légendes, source inépuisable d’inspiration pour tous les artistes, est ici le prétexte à un album réalisé avec le soin, la virtuosité et l’imagination qu’on connaît chez ces deux complices de longue date. Ne passez pas non plus à côté des très belles illustrations de Kimmo Heikkilä qui ornementent le livret accompagnant le CD : de véritables jumeaux graphiques à chacun des 10 morceaux de Sea of Mirrors. Nos deux gentlemen, bien entourés il est vrai, savent une fois de plus nous captiver à l’aide d’un prog folk de haute tenue !
Formation du groupe
Kimmo Pörsti : batterie, percussions, claviers, basse, guitare acoustique - Rafael Pacha : guitares électriques et acoustiques, basse, claviers, lyre, mandoline, viole de gambe, violon électrique, mélodica Avec: - Marek Arnold : sax -Alessandro Di Benedetti : piano - Olli Jaakkola : flûte, flûte basse, hautbois, sax - Laura Pörsti : chant - Paula Pörsti : chant -Alejandro Suarez : chant - Jan-Olof Strandberg : basse
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